L’USLUMAAKU

L’uslumaaku est un système politique par lequel les gouvernants et les gouvernés se concertent dans l’exercice du pouvoir et tous les deux sont soumis au respect de la loi. Étymologiquement, l’uslumaaku vient de la racine << S-L-M >> qu’on retrouve dans les langues chamito-sémitiques en Afrique et en Asie qui signifie à la fois  » se concerter  » et  » respecter la loi ». L’uslumaaku est un mot composé de la racine chamito-sémitique et du suffixe  » aaku » en poular (la langue des Peuls). L’uslumaaku peut être définie aussi comme une organisation politique de la société dans laquelle le dialogue et le respect de la loi sont deux éléments indispensables pour assurer une paix durable dans une société. Par extension, l’uslumaaku peut être qualifié comme une manière de se gouverner qu’adopte un Etat. Il est aussi un système de valeurs. L’existence des institutions et le partage des pouvoirs en vue d’assurer un équilibre sociétal où la dérive n’a point de place. Car un système politique dans lequel il n’y a point de dialogue ou de concertation entre le peuple et les détenteurs du pouvoir mène inéluctablement à la dérive, à la souffrance du peuple, et aussi lorsqu’il n’y a pas de lois qui régissent les rapports sociaux entre les citoyens alors l’anarchie s’installe. L’uslumaaku est un ensemble de valeurs prônant l’égalité, la justice, la bonne gouvernance, la liberté, des valeurs par rapport aux dimensions culturelles et religieuses.

L’Histoire du continent africain est passionnante, de l’empire kémita (l’Egypte antique) en passant par l’empire du Mali avant d’atterrir au royaume Zoulou. Par exemple :
L’empire Kémita : une monarchie théocratique mais bien organisée, le Pharaon pour gouverner tout cet empire a déconcentré le pouvoir, on y trouve des administrateurs régionaux appelés nomarques et le bras droit du Pharaon qu’on appelle Vizir. Les scribes occupaient aussi une place importante au sein de cet empire. L’empire Kémita a civilisé le monde de par ses organisations : politique, sociale, économique, sanitaire, scientifique, etc.
L’empire du Ghana : Kaya Magan Cissé a pu rendre le petit royaume de Wagadu un empire grâce à son intelligence et à sa vision. Koumbi Saleh pour capitale, l’agriculture et l’élevage et le commerce de l’or ont permis le développement de cet empire. L’organisation politique se caractérisait par la décentralisation, l’empire était divisé en provinces et en royaumes. Pour assurer une bonne gouvernance, l’empereur était aidé par des gouverneurs, des rois vassaux. Le conseil des anciens conseillait l’empereur sur la prise des décisions.
L’empire du Mali : après le déclin de l’empire du Ghana, Soundiata keîta ayant vaincu Soumaora Kanté, roi du Sosso, fonda l’empire du Mali, dont la capitale fut Niani. L’empire était organisé comme suit : l’empereur, le conseil des anciens, des gouverneurs, des rois vassaux et les chefferies traditionnelles. L’empire Mandingue est connu pour avoir une caste guerrière très puissante.
L’empire Songhaï : sous les ruines de l’empire du Mali, le royaume de Gao, sous le règne de Soni Ali surnommé aussi  » Soni le Grand  » fonda l’un des plus grands empires en Afrique. Le centre économique et culturel était Toumbouctou tandis que la capitale politique fut Gao. Également l’organisation politique de cet empire se schématise comme suit : l’empereur, le conseil des anciens, les gouverneurs, les rois vassaux.
L’empire du Kongo : Mbanza-Kongo fut la capitale de l’empire du Kongo, Nimi Lukemi réussit à réunir les royaumes dispersés en un seul empire. Le choix de l’empereur était électif par le conseil des anciens. Également l’organisation politique se dessine comme suit : le pouvoir central que détenait l’empereur, le conseil des anciens, les gouverneurs, des rois vassaux.
L’empire Aksoumite : Zoskales fonda cet empire. L’organisation politique du pouvoir se divise entre l’empereur et les royaumes vassaux. Également, l’empereur avait des conseillers pour l’aider à prendre des bonnes décisions. Après le déclin de l’empire aksoumite, l’empire d’Abyssinie également appelé empire éthiopien vu le jour.
L’empire Zoulou : Chaka, jeune guerrier, a su s’imposer et a rassemblé tous les clans qui étaient en conflit. Il a appelé son peuple Zoulou et a incorporé tous les clans vaincus en un seul peuple sur la base d’une égalité totale, les promotions dans l’armée et les services civils devenaient la conséquence du mérite plutôt que l’ascendance. Chaka Zoulou était un grand réformateur où le mérite, la compétence prévalait sur l’ascendance.
L’empire Monomotapa : Mutota a fondé le royaume Monomotapa avant que son fils Matope, grand conquérant n’occupe un territoire qui s’étend sur la quasi-totalité de l’actuel Zimbabwe et une partie du Mozambique limitrophe, rendant ainsi ce royaume un véritable empire puissant et prospère. L’empereur épaulé par des gouverneurs, des rois vassaux.

Il y’a des royaumes et des empires dont l’organisation politque variait en fonction les réalités et les besoins de chaque peuple. L’uslumaaku est la synthèse de toutes ces organisations politiques de ces differents royaumes et empires africains.

Un autre exemple de l’uslumaaku, le Fouta-Djallon qui se trouve dans l’actuelle Guinée. Le Fouta-Djallon fut un royaume fondé en 1725 par les foutankés et qui ont réussit à mettre en place un système politique par lequel le royaume était gouverné suivant des procédés bien établis uniques en Afrique. L’existence de deux partis politiques à savoir : le parti soryanké (soriya) et le parti alphayanké (alpaya) ; qui s’alternent au pouvoir royal. L’ uslumaaku est la synthèse de tous les héritages politiques des royaumes précédents de la Guinée tels que : l’empire mandingue, l’empire wassolon, le royaume de Dubreka, le royaume de Moriah, le royaume de Faramaya et de tous les héritages politiques des différents royaumes et empires en Afrique de l’Ouest et par extension de l’Afrique toute entière. Dès 1725, le Fouta-Djallon devient un royaume uslumaake, c’est-à-dire l’uslumaaku était le système politique, soit soixante-sept ans avant la création de la France en 1792, et encore soit 51 ans avant la création des États-Unis d’Amérique en 1776. Toutes les questions d’ordre public sont soumises à un débat lors des conseils des sages avant que le roi ne prenne la décision finale et aucune action ne se prend unilatéralement. Ce n’était pas la majorité qui gouvernait, mais le pouvoir de la minorité était pour la majorité. Car la majorité désigne toujours des personnes pour les représenter et gouverner pour eux. Mambi Diallo est le théoricien fondateur de l’uslumaaku.